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Les petits et les grands T

Vous ne le savez peut-être pas mais chez les personnes travaillant en santé mentale et contre la violence faites aux femmes, on parle parfois de petits et de grands T. T pour traumatisme dans ce cas-ci. Le grand T fait référence à des évènements qui menacent la vie et les petits T fait référence à tout expérience autre, qui nous bouscule et qui nous fait vivre une réponse de stress. Cette façon de voir les choses a un avantage : celui de parler de traumatismes selon la définition classique tel que défini dans un but diagnostic et en même temps, de reconnaître que d’autres types d’évènements puissent enclencher un ou des traumatismes.  

  

On pourrait aussi dire que l’objectif est de donner un nom différent à différentes expériences mais il y a aussi un effet négatif, c’est celui de catégoriser. Les êtres humains aiment bien catégoriser, ça aide à faire le tri d’informations mais, dans ce cas-ci, ce n’est pas aidant puisque ça vient renforcer l’idée que certains traumas sont pires que d’autres. C’est quelque chose qu’on entends souvent chez les femmes ayant vécu une violence à caractère sexuel. Qui ne s’est jamais dit « Oui, mais ça aurait pu être pire »? Nous vivons dans une société où la parole des femmes est constamment mise en doute, c’est encore plus difficile dans ce contexte de ne pas invalider nous-même notre propre expérience traumatique en se disant que telle personne a vécu pire ou que ça aurait pu l’être.

Au Centre Novas, il n’y a que des grands T pour cette raison. Les recherches démontrent d’ailleurs que les « petits T » comme du harcèlement de rue vécue à répétition peuvent amener des réponses traumatiques équivalentes à celles qui ressortent lors d’un « grand T » comme un viol. Ainsi, les violences à caractère sexuel sont vues comme un tout, où chaque expérience, peu importe laquelle, a le droit d’être validée et où chaque ressenti de chaque femme qui vient chercher de l’aide a de l’espace pour exister pleinement. 

Le mois de novembre est le début des 16 jours d’action contre la violence faites aux femmes, dans toutes ses formes. Je nous encourage, dans notre communauté, dans notre collectivité, à entendre chaque voix, chaque expérience, sans comparaison. Quel que soit la violence sexuelle vécue, il y a toujours des impacts majeurs chez la femme qui la subit. 

Les traumas, comme les violences à caractère sexuel, peuvent se définir de plusieurs façons, mais se trouve à la racine la même chose, soit une perte de contrôle, un sentiment de danger et une atteinte à l’intégrité physique. Que se trouve-t-il à l’inverse de tout cela? Un sentiment de sécurité, autant interne qu’externe. À quoi ressemblerait nos communautés si on osait rêver de rues et d’espaces publics réellement sécuritaires pour les femmes? Si vous pouviez redessiner et sculpter vos espaces extérieurs et intérieurs avec la sécurité comme thème, à quoi ressembleraient-ils?

Tout autant qu’il est primordial et essentiel de regarder sans filtre l’étendue des violences genrées qui touchent majoritairement les femmes, il est aussi important de se garder une petite (ou grande) place de doux où un sentiment de sécurité peut avoir l’espace pour (re)naitre. 

Et toi, ton espace de sécurité, il ressemble à quoi? Il se ressent comment? 


Sophie Séguin

Intervenante - Responsable des services d'intervention

 

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